Maître ! nous sommes perdus !

13 novembre 2022

Lorsque je suis entré au séminaire en septembre 1991, un prêtre m’adressait une carte représentant Notre-Dame-de-Bon-Port, et m’écrivait : « Aie toujours le regard large. Ne t’arrête pas aux difficultés, mais sois toujours attentifs à mieux aimer le Seigneur ». Facile à dire, mais lorsque nous sommes confrontés aux difficultés, nous ne voyons plus qu’elles !

Les disciples qui ont dû subir la violente tempête (cf. Marc 4) avaient emmené Jésus avec eux, « comme il était ». Ce sont eux qui ont eu l’initiative d’aller sur l’autre rive, qui ont emmené Jésus avec eux, qui ont tenu la barre de la barque.

Mais « Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait. ». Dans nos propres vies, les tempêtes aussi peuvent être violentes : les guerres, où les plus récentes font oublier les autres ; les barbaries quotidiennes, par lesquelles une personne peut en tuer une autre pour un regard, une cigarette refusée, un dépassement en voiture… L’actualité nous met cela devant les yeux au quotidien. Cela nous touche encore plus, nous perturbe et suscite notre colère – légitime -, lorsque cela concerne la vie de notre Église. Tout cela génère aussi des tempêtes violentes dans nos convictions, dans nos cœurs : doute, colère, découragement, désespoir…

Dans la barque, la réaction des disciples est surprenante « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? ». Pour être surprenante, elle n’en est pas moins compréhensible, même si elle n’est pas tout à fait ajustée. Ne dévoile-t-elle pas de la colère, du doute, du découragement, du désespoir ? Or, dans ces moments de tempête, il est plus que jamais nécessaire de se tourner vers le Seigneur, alors que nous sommes inquiets, perturbés, que nous n’en avons pas « envie ». Il faut se tourner vers lui encore plus résolument, non pour lui faire des reproches, mais pour lui permettre, par sa Parole, d’apaiser la tempête.

« Réveillé, il menaça le vent et dit à la mer : « Silence, tais-toi ! » Le vent tomba, et il se fit un grand calme. ». Il ne s’agit pas d’oublier ou de faire comme si de rien n’était, mais de laisser au Seigneur reprendre SA place dans nos cœurs et dans nos vies. 

Abbé Bruno Gerthoux, curé de Montfavet